The Leftovers, croire pour ne pas sombrer

Ça y est, The Leftovers a connu sa conclusion. Du haut de son succès critique, la série de Damon Lindelof débutée à l’été 2014 a pris fin avec le dernier épisode de sa troisième saison diffusé il y a quelques jours sur HBO aux Etats-Unis et OCS en France. Mêlant drame et fantastique, cette série n’a cessé d’intriguer et accède avec un final magistral au rang d’immanquables. L’occasion pour moi de revenir sur ces trois saisons et ce que j’en ai retenu.

Un jour et sans la moindre explication 2% des êtres humains disparaissent de la surface de la Terre. Trois ans après cet événement, on suit les histoires des habitants de la petite ville de Mapleton, encore marqués par cette disparition et en perpétuelle quête de vérité. Certains crient au complot, d’autres se réfugient dans la religion et une secte, qui refuse d’oublier ceux qui sont partis, prend de l’ampleur. Le shérif Kevin Garvey (Justin Theroux) doit veiller au calme alors que les commémorations des tristes disparitions approchent.

TheLeftoversCritique (2)

Let’s stay together

Série acclamée par la critique et les spectateurs, j’ai toutefois souvent été plus tempéré sur The Leftovers. Si sa première saison m’a emporté sans peine, sa deuxième m’a perdu en chemin à cause de nombreuses intrigues et nouveaux personnages qui ne me passionnaient pas beaucoup. Mais quand on a su que la troisième saison serait la dernière, j’ai forcément eu envie de la regarder pour voir jusqu’où nous emmènerait cette histoire atypique. Avec Damon Lindelof (Lost) à la baguette, les mauvaises langues ont très rapidement été de sortie, d’autant plus qu’il a annoncé très tôt que le but ne sera jamais d’expliquer les raisons de la disparition de ces 2% d’êtres humains. Mais je dois dire que, au contraire de la fin de Lost qui en a déçu beaucoup, ici très rapidement on n’a plus aucun intérêt pour les causes et les raisons. Et ce parce que The Leftovers ne raconte pas l’histoire de personnes disparues. Cette série raconte l’histoire de ceux qui sont restés.
Bien sûr les personnages les plus touchés par cette disparition, notamment Nora Durst (Carrie Coon) qui y a perdu son mari et ses enfants, vont chercher des réponses. Mais c’est le cheminement qui intéresse ici, la quête de la vérité et non pas son aboutissement. Certains vont se réfugier dans la religion, d’autres dans divers sectes. L’alcool en aidera d’autres, tandis que le déni sera maître parmi le reste. Mais c’est bien les croyances qui sont au centre du récit, qu’elles soient religieuses ou non, elles portent les personnages dans leur « vie après la disparition ». Damon Lindelof propose ici avec une grande sensibilité une tranche de vie de nombreuses personnes qui à chacune à sa manière essaie de s’en sortir, moralement, après le drame. Bien sûr une certaine forme de mysticisme s’invite à la partie, tout comme la dépression ou l’anxiété qui deviennent rapidement les conséquences d’un tel événement. Mais c’est humain et c’est ce qu’il souhaite montrer : 2% semble un chiffre assez peu élevé, et pourtant il suffit à ce que pratiquement tous les humains se sentent concernés par les disparitions.

Je n’avais pas forcément l’intention d’écrire à propos de The Leftovers au début, car comme je l’ai dit plus tôt la deuxième saison m’a presque entièrement perdu. Pourtant cette troisième saison a été une révélation : tout ce qui ne m’intéressait pas dans la deuxième saison prend enfin sens, les personnages gagnent largement en épaisseur et la curiosité pousse à aller toujours plus loin. En se recentrant sur les personnages principaux les scénaristes nous invitent dans des étapes décisives. Par exemple ils nous emmènent visiter l’Australie, le pays où tout semble avoir commencé, mais on suit également une sorte de chemin de croix du prêtre Matt Jamison (Christopher Eccleston), ou la quête de rédemption de Kevin Garvey (Justin Theroux) et de son père (Scott Glenn). Tantôt convaincus par la religiosité de l’événement, tantôt plein d’espoirs, les personnages traversent tous les états jusqu’à finalement accepter la réalité. Leur réalité.
Il est bien évidemment difficile d’en parler sans trop en dévoiler, mais je dois dire avoir été extrêmement touché par le monologue qui conclut le dernier épisode : un rappel de toutes les craintes et les émotions traversées par les personnages. Ici symbolisés par l’un d’entre eux, et qui apporte une dernière « croyance ».

The book of Kevin

The Leftovers est une série que j’ai trouvé difficile à aborder. Avec son rythme lent et l’anxiété qu’inspire la première saison, elle est parfois suffocante. Mais c’est aussi sa force, sa capacité à transmettre le malaise provoqué par la disparition de millions de personnes sans la moindre explication. Au fil des trois saisons, on rencontre énormément de personnages, chacun ayant sa propre expérience vis-à-vis de cet événement et ses propres croyances, et c’est là toute sa force. Si la vie semble s’être interrompue pour beaucoup de monde, en touchant même de loin la plupart des humains, elle continue pour tous les autres et The Leftovers nous montre comment ses personnages se reconstruisent. Parmi eux certains resteront en mémoire, que ce soit le shérif Kevin Garvey ou Nora Durst, car ils incarnent tous deux cette recherche de bonheur et d’une vie paisible alors qu’ils sont bien plus touchés par l’événement qu’ils ne veulent bien l’avouer. Mais j’ai aussi adoré le prêtre Matt Jamison qui se révèle extrêmement touchant alors que sa foi est largement remise en cause. En s’appuyant sur ces personnages, Damon Lindelof est parvenu là à créer une de ses meilleures séries, si ce n’est la meilleure. D’autant plus que la production est impeccable, avec une photographie plutôt soignée et une bande-son sans raté, jusqu’aux dernières secondes.

Longtemps mitigé sur cette série, je dois avouer avoir rapidement oublié les errements de la saison 2, qui s’éparpillait beaucoup trop à mes yeux, grâce à une dernière saison magistrale. Les personnages sont poussés à bout et amenés à faire des choix décisifs, la plupart orientés vers la « vérité » dont ils rêvent. The Leftovers est l’histoire de l’Homme et de ses doutes, ses croyances et ses espoirs. Malgré ses errements, la conclusion est exceptionnelle et porte la série très haut dans mon estime.

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