Captain Fantastic, un monde à part

Captain Fantastic est un film réalisé par Matt Ross dans lequel le cinéaste raconte l’histoire d’un père de famille qui a décidé de s’éloigner du monde capitaliste, en s’efforçant d’éduquer ses enfants avec des valeurs différentes.

Ben Cash (Viggo Mortensen) et sa femme Leslie, lassés par le capitalisme et la superficialité qui règnent dans la société de consommation, ont décidé de s’installer dans la forêt américaine. Avec ce quasi retour à l’état sauvage, ils préfèrent enseigner à leurs enfants la chasse, la survie et les gestes de premier secours plutôt qu’un enseignement classique à l’école. Lorsque Leslie a été touchée par la maladie, Ben s’est retrouvé seul avec ses six enfants et a continué de les élever de cette manière, tout en leur donnant des cours sur la politique, la philosophie, les langues étrangères ou encore la mécanique quantique. Ainsi malgré leur apparent éloignement du système éducatif, ses enfants font preuve d’une culture générale largement supérieure à la moyenne et semblent largement s’épanouir dans ce mode de vie. Un jour alors que leur mère Leslie se suicide dans l’hôpital où elle est hospitalisée depuis longtemps, ils partent sur la route avec leur père pour se rendre aux funérailles malgré le refus de la belle-famille, un père qui sera bien contraint au cours du voyage à se poser des questions sur leur mode de vie et la place de ses enfants dans ce monde qu’ils ne connaissent pas.

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Sweet Child O’ Mine

Ce film n’est pas l’histoire d’un illuminé ou d’un « gourou » qui aurait décidé de s’éloigner du monde pour maintenir un grande autorité sur ses enfants. Malgré les apparences, Ben est un père qui aime énormément ses enfants et n’agit de la sorte que dans l’espoir de leur faire vivre une autre vie que celle qui l’a déçu des années auparavant. L’argent, la société de consommation sont la source de tous ses problèmes et le « rêve américain » est mort depuis bien longtemps dans sa tête. Ce retour à la nature lui permet de se concentrer sur ce qui compte vraiment, à savoir la relation qu’il entretient avec sa femme et ses enfants, et lui permet de leur fournir une éducation différente de celle que l’école leur aurait donné : il souhaite leur donner une grande culture générale, un esprit critique très développé et une capacité à s’intéresser à tous les sujets peu importe leur âge. Il préfère leur enseigner la philosophie et différentes idéologies politiques, des théories scientifiques plutôt que leur enseigner des choses qui à ses yeux n’ont strictement aucun intérêt et ne font que glorifier un monde qu’il exècre. Il n’est pas du genre à leur mentir avec de belles histoires sur le père Noël ou la mort et le paradis, il préfère les confronter à la réalité et leur apprendre des valeurs plus terre à terre. Mais ce n’est pourtant pas un personnage figé dans le temps, qui malgré ses certitudes n’hésitera pas par exemple à demander à un de ses enfants, qui se demande pourquoi ils fêtent Noam Chomsky plutôt que Noël, d’essayer de les convaincre de fêter Noël en leur livrant tous ses arguments. Si Ben apparaît au début du film comme un quasi-tyran hermétique à l’extérieur et une pensée différente de la sienne, il se révèle très compréhensif et ouvert à toutes idées.

Et c’est lorsqu’il va devoir « affronter » sa belle-famille qui refuse sa présence aux funérailles de sa femme, et qui lui reproche le mode d’éducation qu’il a choisi pour ses enfants, qu’il va devoir se remettre en question et laisser ses enfants faire l’expérience de choses de la vie qu’ils n’ont jamais connu. Ce choc entre deux modes de pensée est intéressant car il met en perspective les défauts des uns et des autres, et révèle que Ben n’est pas plus tyran que son beau-père, chacun ayant ses certitudes. Avec une superbe performance de Viggo Mortensen, Ben est un personnage très attachant qui parvient à nous séduire dans un mode de vie éloigné du notre, qui prête presque à rire au premier abord mais qui finit par nous convaincre et nous rappeler que les meilleures choses de la vie sont près de nous et doivent être appréciées : sans verser dans un discours moralisateur, le cinéaste Matt Ross ramène à la réalité le spectateur en lui montrant que très peu de choses ont une réelle importance, que peu de choses méritent réellement que l’on s’en soucie. Captain Fantastic est une sorte de fable, presque poétique, dans laquelle l’Homme s’est émancipé de tous les tracas d’un quotidien commandé par le capitalisme.
Les jeunes au casting apportent aussi leur touche de sincérité et d’émotion qui m’a beaucoup touché, à l’image de George MacKay, l’aîné de la fratrie, qui est le premier à rêver d’une vie différente malgré l’amour qu’il porte à son père, ou encore les très jeunes Shree Crooks et Charlie Shotwell qui portent un regard innocent sur une situation qui les dépasse mais qui suffit à les combler de bonheur auprès d’un père qui ne souhaite que leur bien.

I Shall Be Released

Le film offre un très grand nombre de scènes particulièrement touchantes, de petits dialogues lourds de sens entre le père et ses enfants, des moments de joie et de tristesse où les défauts et les failles des uns font la force des autres. Malgré tous les problèmes qu’apportent le mode de vie qu’a choisi Ben, on ne peut s’empêcher de le voir comme un héros fidèle à ses convictions dont le seul objectif est l’épanouissement de ses enfants. Mais Captain Fantastic c’est aussi probablement l’une des meilleures bande sons de l’année. De Sweet Child O Mine des Guns N’ Roses ici interprété par les acteurs du film à d’autres titres qui donnent bien envie de se mettre sur la route et explorer le monde, le film est une formidable réussite sur ce plan là. Chaque scène presque « contemplative » est accompagnée de l’un de ces titres qui suffisent à eux seuls à poser une ambiance et une réflexion qu’aucun dialogue ne le pourrait.

En fin de compte Captain Fantastic est une grande surprise, un film dont je n’avais rien suivi avant d’aller le voir en salle totalement par hasard. Probablement l’un des meilleurs films que j’ai pu voir cette année, c’est un film plein de poésie et d’émotion qui m’a bluffé de bout en bout. Viggo Mortensen y tient là un rôle magistral et m’a embarqué sans problème dans un monde fantastique.

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