Trois ans après le dernier épisode, le réalisateur Christopher McQuarrie reprend du service aux côtés de l’infatigable Tom Cruise pour proposer un sixième épisode à la célèbre saga. Mission: Impossible – Fallout, dont une bonne partie de l’action se déroule à Paris, amène le genre de l’action et son statut de référence.
Le Syndicat est tombé (Mission: Impossible – Rogue Nation), mais une bonne partie de ses agents restent actifs, et se sont regroupés sous un nouveau groupe terroriste dénommé « Les Apôtres ». Ethan Hunt (Tom Cruise) et ses collègues doivent reprendre du service et mettre la main sur des bombes de plutonium qui ont été dérobées récemment.
A Storm is Coming
En prenant la main sur la réalisation de Mission Impossible avec l’épisode Rogue Nation en 2015, Christopher McQuarrie démontrait déjà d’énormes qualités et un vrai bond en qualité pour la saga. Si les Mission Impossible avaient toujours eu un certain charme tant pour le héros interprété par Tom Cruise que son mythique thème musical, ou les quelques idées jetées ici et là à tour de rôle par Brian De Palma ou John Woo, Christopher McQuarrie a lui apporté une maîtrise de l’action devenue fondamentale pour la série. Bien aidé par son héros prêt à risquer sa vie sur chaque tournage (et il l’a fait un nombre incalculable de fois pour ce nouvel épisode), il fait parler pendant plus de deux heures sa manière d’aborder l’action et de la mettre en scène. En prenant Paris comme principal terrain de jeu du film, il s’amuse des ruelles parisiennes et des bords de Seine, de son Grand Palais et de sa dense circulation pour nous raconter une histoire épique entre évasion, compte à rebours et courses-poursuites dantesques. Bien sûr, et je le dis d’emblée, je suis tout acquis à la cause de McQuarrie car je partage grandement sa vision de l’action, notamment le point qu’il soulevait dans une interview en 2015 pour Film Comment, et notamment sa manière de filmer les scènes d’action. Pas de shaky-cam ni de rack zooms responsables de bon nombre de mal de têtes, mais au contraire une action toujours lisible et à hauteur d’homme. Sans utiliser trop d’artifices pour rythmer l’action, il nous propose un Mission: Impossible – Fallout impressionnant où les scènes s’enchaînent sans boucherie d’un montage hasardeux. Cette science de l’action est un véritable atout pour le réalisateur qui travaille désormais sur la saga, car l’essentiel de son intérêt réside dans la manière dont il apporte ce sentiment d’épique par l’action.
Bien sûr, Mission: Impossible – Fallout n’apporte pas grand chose de neuf à la série, on assiste toujours à l’une de ces missions improbables où les rebondissements sont nombreux et les trahisons terribles. Tom Cruise fera parler son impressionnante performance physique, ridiculisant presque Henry Cavill, tout en proposant un héros pratiquement en quête de rédemption, tandis que Simon Pegg et Ving Rhames sont toujours là pour apporter un peu de cœur et de dérision à l’équipe. On découvre toutefois de nouveaux personnages à cette occasion, notamment la Veuve Blanche, une milliardaire qui trempe dans des trafics pas vraiment recommandables, interprétée par la géniale Vanessa Kirby. Celle-ci apporte une opposition bienvenue et relativement inattendue à l’agent Ethan Hunt, bien que l’on reste dans quelque chose d’assez convenu. Tout comme la relation de ce dernier avec l’agent incarné par Henry Cavill, montagne de muscle pas vraiment fine, il ne sert finalement qu’à mettre en avant la ruse et l’élégance du célèbre agent. Pour autant la dynamique fonctionne totalement grâce au réalisateur qui a été capable de nous captiver dans une nouvelle histoire impossible, tout en s’inspirant parfois de la réalité. Difficile en effet de ne pas voir une évocation aux attentats de Paris dans ce « rêve » cauchemardesque que fait Ethan Hunt lorsqu’il apprend qu’il devra faire évader quelqu’un, réalisant que cela tournera probablement au massacre. Pour autant le film ne verse pas dans le voyeurisme au contraire de ceux qui ont pu évoquer de tels événements plus ou moins récemment (qui a dit « Le 15h17 pour Paris » ?) et Christopher McQuarrie ne perd pas de vue l’essence même de la saga. Néanmoins l’évocation, sous-entendue, des événements qui ont marqué Paris apporte une certaine force à des scènes de fusillades et de violences qui auraient pu être assez anodines pour la saga.
The Manifesto
Au-delà de ça, Mission: Impossible – Fallout est avant tout une véritable réussite de genre. Film d’action pleinement assumé, il exploite les gimmicks de la saga pour en faire un épisode mémorable qui pousse un peu plus loin les limites du genre. Bien évidemment on n’a cessé de parler des exploits de Tom Cruise (56 ans, quand même), de son HALO Jump, une scène vraiment exceptionnelle, à ses exploits aux manettes d’un hélicoptère, mais ce qui frappe particulièrement en regardant le film c’est son rythme. Sans temps mort, tout en prenant le temps de s’intéresser à ses personnages, le réalisateur donne une leçon au genre en proposant ce qui se fait de mieux de nos jours en matière d’action. Il est bien difficile de trouver à redire sur le film, car si la saga s’était essoufflée à une époque et restait assez dispensable, depuis Rogue Nation et ce Fallout, Mission Impossible a pris une nouvelle envergure. D’autant plus que la musique de Lorne Balfe apporte elle aussi au film, avec une bande originale attendue et peu surprenante, mais qui à l’image du film fait son travail avec justesse.
Mission: Impossible – Fallout est à la hauteur des attentes. Si le film ne cherche jamais à révolutionner le genre ou la saga, il parvient toutefois à l’amener encore plus loin et à s’installer comme une référence du genre. Malin et souvent impressionnant, ce sixième épisode des aventures de Ethan Hunt sonne comme une consécration pour un genre qui peine parfois à séduire. Un réussite pour Christopher McQuarrie, et une nouvelle preuve qu’il excelle dans ce genre, avec une formidable approche de l’action et de sa mise en scène.