BrainDead est une série créée par Michelle et Robert King (créateurs de The Good Wife) et diffusée aux Etats-Unis pendant l’été 2016. Satire politique en treize épisodes, elle raconte comment le pouvoir politique à Washington a été infesté par des insectes venus de l’espace.
Laurel Healy (Mary Elizabeth Winstead), réalisatrice de documentaires humanitaires, rencontre des difficultés dans le financement de son nouveau film. Pour obtenir des fonds elle accepte de travailler pour son frère, le sénateur démocrate Luke Healy (Danny Pino), qui l’embauche afin de recevoir et d’écouter les plaintes des électeurs de sa circonscription, dans le but de trouver d’y apporter des solutions. Mais alors que le gouvernement est plongé dans une paralysie due à un désaccord entre les deux camps, Laurel découvre l’existence d’insectes extraterrestres qui prennent le contrôle du cerveau des employés et politiques au Sénat. C’est avec l’aide de Gareth Ritter (Aaron Tveit), l’assistant d’un sénateur républicain, la docteure Rochelle (Nikki M. James) et le pseudo-scientifique Gustav (Johnny Ray Gill) qu’elle va se mettre en quête de vérité alors que les extraterrestres semblent prendre possession de toute la classe politique américaine.
You Might Think
En s’interrogeant sur le comportement étrange de certains politiques, Laurel fait la rencontre de Gustav et Rochelle, un pseudo-scientifique et une docteure qui se lancent avec elle sur la piste d’insectes qui semblent dévorer le cerveau de leurs « hôtes ». Ces insectes venus tout droit de l’espace ont un plan et celui-ci passe par un contrôle total du Sénat américain. Dans ce contexte de « fin du monde » les compères se lancent dans une bataille contre cette conspiration, un parcours semé d’embûches tant tous les organes gouvernementaux sont touchés, mais également par leur méconnaissance du sujet : ils ne savent ni quand ni comment les gens sont infestés, ni même comment se défendre contre ça. Si cette histoire de science-fiction paraît absurde, et elle l’est, en témoigne le goût prononcé des infectés pour la chanson You Might Think de The Cars, c’est surtout un moyen de traiter de la corruption et de l’hypocrisie en politique.
En effet derrière cette histoire invraisemblable, BrainDead s’amuse surtout du débat politique américain, de ses clichés et ses excès, de ses contradictions et ses hypocrisies. A quelques semaines de l’élection présidentielle américaine, la série se sert de l’intrigue sur les insectes extraterrestres pour illustrer la corruption qui règne au sein du Congrès américain. A mille lieux du quasi-sérieux d’un House of Cards, BrainDead utilise l’humour et la métaphore pour montrer les magouilles et arrangements « entre amis » lorsqu’il s’agit de voter des lois et accorder des subventions aux divers lobbys. Les électeurs qu’écoute Laurel pour établir des rapports sur leurs besoins sont dépeints parfois comme des ignorants, d’autres fois comme des fanatiques mais le plus souvent comme des moutons aliénés par les insectes extraterrestres, symboles des mensonges et promesses faciles de candidats. Jamais tendre avec les femmes et hommes politiques qui composent le Sénat américain, la série n’épargne pas non plus des électeurs prêts à croire n’importe quelle promesse pour peu qu’elle les arrange. Ce petit jeu politique est traité avec un cynisme et un sarcasme particulièrement drôle, si l’on ne rit jamais aux éclats, l’humour pince-sans-rire m’a beaucoup séduit, avec une Mary Elizabeth Winstead qui se balade dans ce qui semble être son élément.
C’est aussi l’histoire d’une opposition entre démocrates et républicains, qui va particulièrement se matérialiser dans la relation qu’entretient Laurel avec Gareth, relation de travail puis amoureuse entre deux personnes que tout oppose : elle est de gauche, portée sur le travail humanitaire et fervente défenseure des droits humains, tandis que Gareth est un conservateur convaincu dépeint comme le gendre idéal qui souhaite continuer le modèle familial américain.
We Shall Not Be Moved
Inventive et drôle, cette satire politique repose sur des dialogues voguant entre absurde et sarcasme, des dialogues qui font tout l’intérêt de la série tant les personnages sont à la fois dépassés et conscients de l’absurdité de la situation. Les différents personnages apportent chacun une vision différente sur l’histoire, qu’ils soient infectés ou pas, et traduisent l’hypocrisie de chacun des deux camps. L’échiquier politique est tourné en ridicule, un univers où l’on s’écharpe pour des questions d’ego avant de trouver un accord en s’échangeant des subventions. Les acteurs tiennent ces rôles avec brio, si on peut citer l’actrice principale Mary Elizabeth Winstead qui montre là tous ses talents, j’ai également noté Johnny Ray Gill en pseudo-scientifique paranoïaque, particulièrement drôle.
Le récit suit une structure presque théâtrale en 13 actes qui viennent chacun illustrer des idées (annoncées dans les titres des épisodes), des actes qui sont à chaque fois résumés au début de l’épisode suivant par des chansons chantées par Jonathan Coulton, des textes très drôles qui viennent appuyer sur l’ironie des différentes situations.
Néanmoins le public américain n’a pas été convaincu, après une chute importante d’audience, la série a été annulée par son diffuseur CBS et ne connaîtra donc pas de suite. Fort heureusement, l’unique saison se suffit à elle-même puisque les auteurs Michelle et Robert King ont imaginé la série de telle sorte que chacun des saisons originellement prévues (quatre au total) raconteraient quatre histoires différentes. Ainsi n’ayez crainte : commencer BrainDead ne vous laissera pas frustrés et sans réponse, puisque le dernier épisode conclut parfaitement les intrigues lancées au cours de la saison. La seule frustration est qu’on ne reverra jamais ces personnages attachants et drôles, et ce ton absurde qui fait tout le charme de la série.