La sortie du premier Deadpool en salles il y a deux ans constituait un véritable événement. Non seulement son acteur Ryan Reynolds avait tenté de mettre sur pieds le projet pendant plus de dix ans, confronté à un studio qui ne croyait pas au potentiel du personnage, mais en plus ce mercenaire trash et sans limites apportait un vent de fraîcheur à l’univers des super-héros bien trop gentillet au cinéma. Avec Deadpool 2 la licence change de réalisateur avec l’arrivée de David Leitch, mais conserve la même folie meurtrière propre au personnage.
Contraint de rejoindre les X-Men, Deadpool (Ryan Reynolds) doit aller porter secours à un jeune mutant avec ses nouveaux partenaires. Mais les choses vont mal tourner et il sera jeté dans une prison anti-mutants en compagnie du jeune qu’il devait secourir. A l’occasion d’une attaque de la prison par Cable (Josh Brolin), un soldat venu du futur, Deadpool s’échappe et fonde la X-Force, une équipe concurrente aux X-Men, pour affronter Cable.
Welcome to the Party
Le même en plus grand, plus fort et plus fou, voilà ce qui permet de décrire de la meilleure des manières ce deuxième épisode des aventures de Deadpool. Le personnage irrévérencieux de Marvel, porté à bout de bras par un Ryan Reynolds passionné, nous invite dans une histoire qui s’accroche sans cesse aux réussites, mais également aux erreurs, de l’épisode précédent. Toujours aussi référencé et dingue, le film réalisé par David Leitch se révèle paradoxalement plus ambitieux, mais aussi moins surprenant que son prédécesseur. Plus ambitieux parce que l’histoire de Deadpool et sa personnalité vont s’enrichir grâce à de nouvelles problématiques qui se posent à lui, en tête desquelles la famille et son appartenance (ou non) aux fameux X-Men. Le film prend alors une tournure différente du premier, avec des enjeux plus importants et surtout un nombre important de nouveaux personnages qui viennent donner un coup de main au héros, qu’il s’agisse de la X-Force qu’il va tenter de constituer ou de Cable, un ennemi pas si méchant que ça. Mais à côté le film ne peut pas compter sur l’effet de surprise qu’avait suscité le premier, notamment parce que l’on a depuis été habitué à voir des anti-héros dans les films de super-héros, mais aussi parce que Deadpool 2 repose essentiellement sur le même type de vannes que le précédent. Pourtant cela n’est pas forcément un mal : si on n’est pas surpris par ce que propose le film, il n’en reste pas moins souvent drôle et imaginatif. Je pense notamment à ce générique en début de film qui s’inspire largement des génériques des films James Bond, accompagné du titre Ashes que Céline Dion a chanté pour le film. Mais plus généralement, Deadpool 2 est un plaisir à parcourir pour un amateur de comics tant cette fois-ci le film, très référencé, s’intéresse à son matériau d’origine. Si le premier faisait essentiellement référence à la pop culture, le deuxième épisode tente lui de parler aux fans de comics avec de nombreuses références à son univers et ses personnages. Un choix intéressant de la part de Ryan Reynolds qui compense là un manque de surprise par un intérêt plus prononcé pour l’univers duquel le personnage qu’il aime tant est tiré.
Ryan Reynolds a toujours joué un rôle central à l’arrivée de Deadpool sur grand écran, d’abord avec l’horrible adaptation du personnage dans le film X-Men Origins : Wolverine puis avec le premier film de 2016 après une décennie à tenter de le faire financer. Cet amour que l’acteur porte au mercenaire de l’univers Marvel est plus que jamais visible grâce à Deadpool 2, car si toutes les vannes ne tombent pas toujours juste, il est indéniable que l’acteur s’est véritablement éclaté à tenter toutes sortes de choses avec le personnage et cela se traduit à l’écran. On sent facilement cette bonne humeur et ce plaisir à faire évoluer un personnage atypique de l’univers Marvel, tout en s’amusant avec ce même univers. A l’image du parallèle constant avec Logan, le film qui marquait la fin des aventures de Wolverine au cinéma. Partant du postulat que Deadpool doit mourir dans son nouveau film pour voler la vedette à Wolverine, l’histoire va s’appuyer assez largement sur Logan et son récit autour de l’identité et des attaches quasi-familiales du héros pour en proposer une version plus trash et plus folle que dans le film de James Mangold sorti en 2017. En jouant sur ce parallèle, le réalisateur David Leitch propose une vision assez inattendue des films de super-héros en ne s’appuyant pas sur l’univers partagé pour simplement faire apparaître des personnages populaires ici et là (même s’il n’hésite pas à le faire au cours d’un caméo), mais plutôt en utilisant cet univers pour marquer les ressemblances et les codes qui unissent les différents films. A peu de choses près, Deadpool 2 et Logan traitent des mêmes problématiques et se reposent sur les mêmes ressorts scénaristiques, pourtant le traitement global de l’ambiance et de l’attitude des héros est tellement différent qu’au premier abord on ne verra pas beaucoup de similitudes entre les deux films. Ici le film se veut plus détendu, et cela se voit tant au niveau des références amenées dans les dialogues et à l’image qu’au travers de la bande son du film toujours très pop. Mais c’est pourtant cette proximité entre Deadpool 2 et Logan qui fait toute la particularité du film.
All Out of Love
Deadpool 2 est donc extrêmement intéressant au-delà de son simple récit et de ses nombreuses vannes. D’autant plus qu’elles ne sont pas toujours réussies, et je dois avouer avoir beaucoup moins rigolé que devant le premier film, probablement à cause d’un effet de surprise beaucoup moins marqué. Pourtant j’en suis sorti avec l’impression que l’humour du film était bien plus abouti que son prédécesseur. Il se repose en effet beaucoup moins sur le name dropping, apporte plus de références à l’univers qu’il exploite mais surtout, Ryan Reynolds joue énormément sur l’auto-dérision tant en critiquant sa carrière (comme il le fait depuis bien longtemps en interview) que son propre film, duquel il prend suffisamment de distance pour apporter une vision plus juste et moins naïve que dans le premier épisode. D’autant plus que la réalisation de David Leitch est beaucoup plus maîtrisée que celle de Tim Miller, notamment par son expertise en matière d’action (il a réalisé Atomic Blonde et s’est chargé des scènes d’action de John Wick) mais aussi la mise en scène des nombreuses vannes. Je pense notamment à la référence humoristique à Basic Instinct, particulièrement bien sentie, ou même à l’arrivée des héros de la X-Force pour leur première mission. Deux scènes bien amenées et parfaitement inscrites dans l’esprit du personnage de Deadpool et son univers.
Plus fou et plus maîtrisé que son aîné, Deadpool 2 parvient à séduire malgré un effet de surprise complètement absent. Ceux qui ont détesté le premier détesteront encore celui-ci, tandis que les fans ne seront jamais surpris. Les vannes ne sont pas toutes réussies, mais pourtant certaines valent vraiment le détour et offrent au film un caractère intéressant, d’autant plus que l’acteur et scénariste Ryan Reynolds s’est enfin libéré. Avec la confiance acquise grâce au succès du premier, il est parti explorer de nouvelles facettes de l’univers super-héroïque et apporte une vision sympa tant sur l’univers partagé propre aux comics que dans sa proximité avec le film Logan. Sans être un grand film de super-héros, Deadpool 2 est ce plaisir coupable que j’attendais, même si j’aurais apprécié un peu plus d’ambition et de folie avec ce personnage si malléable que tout devrait être possible. La fameuse scène post-générique dont tout le monde parle depuis la sortie du film en est d’ailleurs le meilleur exemple : entre récit méta et violence, la scène complètement folle montre qu’il n’existe aucune limite pour le personnage tant par ses caractéristiques que la manière dont l’acteur a su se l’approprier.