Dans sa quête de diversité des productions, Netflix s’amuse à commander des séries et films un peu partout dans le monde, et inévitablement en Corée du Sud. Populaire pour ses films mais également pour ses dramas, l’industrie Coréenne était un passage obligé pour le géant Américain à l’heure où la plateforme a besoin de nouveaux contenus pour garder une longueur d’avance sur ses (nombreux) concurrents. Et parmi eux, on découvrait il y a deux ans Love Alarm, une romance à la première saison plutôt moyenne (comme je l’écrivais sur Ciné-Asie en début d’année dernière) qui avait du mal à convaincre. Malgré ces quelques difficultés, le succès populaire était au rendez-vous et le drama s’est vu agrémenté d’une deuxième saison sortie le 12 mars 2021.
Quatre ans après les événements de la première saison, Jojo (incarnée par Kim So-hyun) et Hye-young (joué par Jung Ga-ram) filent le parfait amour : dans un monde régit par l’application « Love Alarm » qui permet de connaître avec certitude les sentiments des uns et des autres, les deux amoureux ont trouvé leur équilibre. Mais c’était sans compter sur la réapparition de Sun-oh (Song Kang), le dernier membre du triangle amoureux qu’ils formaient au lycée.

Les difficiles relations humaines
Plus que son triangle amoureux, Love Alarm intriguait pour tout ce que le drama avait à dire (ou non) sur les nouvelles technologies et par extension les réseaux sociaux. C’est en effet une histoire où l’on imaginait un monde similaire au notre, avec pour exception l’existence d’une application sur smartphone capable de déterminer si une personne est réellement amoureuse d’une autre. Si cela n’apparaît au départ que comme un petit gimmick qui amuse les couples d’adolescents, rapidement les choses prennent une tournure plus dramatique. Des couples se séparent, des jeunes se sentent isolé·e·s car au contraire de leurs ami·e·s, aucun « like » n’apparaît sur leur application. La première saison observait des personnages qui approchaient doucement de l’âge adulte, quand la recherche de la validation des autres est intense, un moment où l’on veut être aimé·e·s, soutenu·e·s, et certainement pas à l’écart. Mais c’est aussi un moment où les comportements toxiques sont légion, notamment en matière de relations amoureuses où les couples se font et défont quand on n’a pas encore appris à gérer certains sentiments et déceptions. Alors pour tous ces aspects, le drama Love Alarm est particulièrement intéressant, avec une véritable volonté d’explorer les relations humaines au-delà du triangle amoureux plan-plan qui avait bien du mal à nous intéresser. Mais c’est aussi un drama qui traitait parfois avec trop de légèreté de l’impact qu’aurait une telle application sur les relations humains, notamment le côté toxique. Et cette deuxième saison vient gommer ces problèmes, notamment dans ses deux derniers épisodes, avec une approche plus mature et nécessairement plus intéressante. On y découvre les rouages d’une société gangrénée par une recherche de popularité et d’amour, obsédant certain·e·s, et décourageant d’autres. Cela passe aussi par les personnages principaux qui se posent enfin de véritables questions sur la place de l’application dans leur couple.
Cela donne lieu à des réflexions intéressantes, notamment sur la sincérité des sentiments qui sont dictés par une application au fonctionnement opaque. La question de la vérité est centrale, qui plus est dans une série qui s’appuie sur une narration à base de « tranche-de-vie » où les protagonistes tentent de mener des vies plus ou moins normales malgré l’influence de l’application. La narration se balade d’ailleurs entre ce côté terre à terre du quotidien de quelques jeunes, et un côté plus science-fiction où un futur proche prend une tournure plus effrayante. Le mélange des genres fonctionnent d’autant mieux que Kim So-hyun et Jung Ga-ram forment un joli couple à l’écran, bien aidé·e·s aussi par des personnages secondaires qui gagnent en présence et en épaisseur, comme l’illustre très bien l’arc narratif autour du rôle joué par Go Min-si (en image ci-dessous) qui incarne la perpétuelle quête de popularité et de reconnaissance induite par une telle application. Cela aide aussi une histoire qui, au contraire de la première saison, ne s’embourbe pas dans un interminable triangle amoureux qui n’avait plus grand chose à dire après quelques épisodes.

Une histoire d’amour instable
On observe aussi le bon goût qu’a cette deuxième saison de ne durer que six épisodes, bien que certains en espéraient plus. Cela permet de concentrer la narration sur une poignée d’épisodes au rythme soutenu, denses et qui vont droit au but. Entre moments de douceur et mystères autour de l’identité réelle du créateur de l’application, Love Alarm réussit de bien belles choses. La réalisation reste toutefois assez quelconque, comme dans la première saison, en profitant allègrement d’une mise en scène intéressante lorsque l’application est utilisée mais délaissant tout le reste. Champ-contrechamp basique, regards accentués sur fond de musique, tous les clichés de la mise en scène des dramas Coréens y passent. L’étalonnage interroge d’ailleurs, ne trouvant pas vraiment de juste milieu entre la froideur de certaines scènes et les couleurs éclatantes, quasi-féériques, d’autres séquences.
Plus solide que sa première saison, cette suite de Love Alarm pose les bonnes questions sur son concept et pousse ses personnages un peu plus loin, maintenant qu’ils gagnent en maturité après les romances lycéennes des débuts. Le drama peut en effet compter sur une super galerie de personnages qui dépassent enfin les clichés qu’ils incarnaient initialement, même si la réalisation peine encore à se mettre au niveau de ses acteur·ice·s.