Le défi du champion, dans les pas d’un autre

Pays de football, l’Italie accorde une place toute particulière à un sport sans pareil. Pourtant et comme beaucoup d’autres, elle reste confrontée à des joueurs qui manquent parfois de maturité et d’un sens des responsabilités alors que le football business les presse comme des citrons pour en extraire le maximum de profits. C’est cette question dont s’empare le réalisateur italien Leonardo D’Agostini dans le film Le Défi du champion, dans quelques jours, le 5 août, au cinéma.

Christian (incarné par Andrea Carpenzano) est la nouvelle pépite de l’AS Roma, mais ses frasques hors du terrain mettent en péril la confiance accordée par son club. Mis au défi de se mettre en rang et de passer son bac, il fait la rencontre de Valerio (joué par Stefano Accorsi), son nouveau professeur particulier.

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© Le Défi du champion, 2020, Destiny Films

Le foot business et l’humain

Au-dessus de l’idée de parler de football business plane toujours le risque de la facilité, celle du « tous pourris » qui met l’humain de côté. Pourtant c’est évidemment un sujet intéressant, encore plus ces dernières années avec l’explosion des budgets qui a injecté toujours plus d’argent dans le football. Et le héros de cette histoire, ce jeune joueur prénommé Christian, en est le produit. Jeune, beau, extrêmement riche et adulé par un stade entier, il représente à lui seul cette image de marque, ce profit qui est mis au devant de la scène, laissant l’humain loin derrière. Dépossédé de son image et de sa nature, il n’est qu’un pion pour un club, un agent et des proches qui ne cherchent là que leur intérêt, jusqu’au jour où tout cela est mis en péril à cause des frasques du jeune joueur qui ne se sent pas vraiment responsable de grand chose. Le joueur n’est pas sans évoquer bon nombre de footballeurs italiens dont le talent a souvent été occulté par une immaturité certaine (El Shaarawy, Balotelli, Verratti…) et s’inscrit finalement de manière assez réaliste dans son époque en introduisant un petit monde insouciant et naïf, où l’on peine à garder les pieds sur terre avec une popularité qui dépasse toute mesure. Mais le film prend rapidement tout cela à contre-pied, en mettant de côté les clichés pour se focaliser sur l’humain : derrière le foot business, il y a un jeune homme fondamentalement bon et un professeur qui tentent, ensemble, de surmonter les défis qui se posent face à eux.

Duo séduisant, Andrea Carpenzano et Stefano Accorsi apparaissent avec une sensibilité et une bienveillance touchante, leurs personnages n’étant finalement que deux hommes simples, chacun à sa manière meurtri par un passé difficile. Dans leur petite collaboration en vue de faire réussir le bac au jeune joueur, condition sine qua non pour que celui-ci ait un avenir à l’AS Roma, les deux hommes se révèlent l’un à l’autre grâce à cette superbe rencontre qui change leurs vies. L’un apprend à gagner en responsabilité et à s’éloigner de ceux qui ont un impact toxique sur sa vie, l’autre apprend à vivre avec ses démons et les dépasser. La solitude est au centre de leurs problèmes, avec un système qui enferme les jeunes joueurs dans un monde de paillettes où les amitiés sont factices et où ils ne sont finalement que très seuls face à la gloire qui leur tombe dessus. Très classique dans sa forme, le film n’en reste pas moins une réussite chaque fois qu’il met en avant ses deux héros. Si le football n’est finalement pas essentiel à cette histoire, le réalisateur trouve tout de même une certaine force aux scènes de matchs qu’il propose, en apportant un plus dans la construction du personnage et son évolution. Souvent réussies (à l’exception d’un match sous la pluie), ces séquences marquent à chaque fois une nouvelle étape dans l’évolution du joueur : d’abord impulsif, puis plus mature par la suite.

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© Le Défi du champion, 2020, Destiny Films

Deux générations aux problèmes similaires

Et si cela fonctionne aussi bien, c’est parce que les deux acteurs sont terriblement charismatiques et attachants. La dynamique fonctionne bien entre les deux, quand bien même la réalisation sans fioritures ne marque pas les esprits. Mais Leonardo D’Agostini s’en sort à merveilles quand il met à nu ses personnages en leur laissant le temps d’échanger, de se poser et de se révéler. Dans ces moments il prend du recul avec une mise en scène très simple qui permet de saisir le meilleur de ses acteurs et accentuer un peu plus cette quête de repères qui caractérise le joueur. Je suis d’ailleurs surpris que l’AS Roma ai laissé son image être utilisée de la sorte : entre un dirigeant qui ne pense qu’à l’argent et un système qui broie les jeunes joueurs, on ne peut pas dire que le club soit mis à son avantage.

Le Défi du champion est une petite surprise portée par des acteurs séduisants. Le monde du football se confronte à une jeunesse en quête de repères dans un film qui s’éloigne rapidement des clichés attendus pour faire la place à une relation étonnante et pleine de bienveillance. Sans prétention, Leonardo D’Agostini offre un véritable film « feel good » dont on a terriblement besoin cet été.

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