Au rayon des curiosités cinématographiques de cet été, on trouve Tempura. Réalisé par Akiko Ohku, à qui l’on doit le sympathique Tremble all you want, le film porté par une géniale actrice nommée Non est une bouffée d’air frais qui fait un bien fou en cet été compliqué.

Le for intérieur
On trouve dans Tempura des thématiques similaires à Tremble all you want, en particulier celle de la solitude. Un sentiment éprouvé par Mitsuko, une jeune femme qui vit seule, avec pour seul compagnon une voix intérieure avec laquelle elle dialogue régulièrement. Le film prend alors un ton assez particulier, à mi-chemin entre la comédie et le fantastique, avec cette voix qui devient un personnage à part entière tandis que Mitsuko est confrontée à une vie à nombreux rebondissements. Pourtant c’est sa solitude et ses réflexions intérieures qui font tout le sel de l’histoire, offrant un oeil pertinent sur ce que c’est d’être une femme seule dans une grande ville, avec la difficulté d’aller vers l’autre et de se faire une place dans une société hyper-patriarcale, où sa particularité et son désir de conserver au moins un peu de solitude étonne les autres. Car on découvre une personne qui est loin de se morfondre sur elle-même, contrairement à d’autres récits qui parlent souvent de solitude négativement. Mitsuko, elle, ne semble pas être atteinte par un quelconque malheur, sa solitude s’apparentant souvent à une forme de liberté.
À certains moments, le film lorgne même vers une sorte de comédie romantique, quand l’amour finit par elle, alors qu’elle est considérée comme « inadaptée » à une vie sociale que la société tente pourtant de lui coller aux forceps, notamment au travers des sorties entre collègues. Le film sort des sentiers battus, notamment ceux de la romance dans le cinéma Japonais, en se jouant des stéréotypes avec beaucoup d’humour. C’est un film malin, où la réalisatrice Akiko Ohku montre tout son intérêt pour des portraits de femmes modernes, comme dans son précédent film, en rupture avec la représentation féminine très classique (comme amante, conjointe et mère) que l’on observe depuis toujours au cinéma. La réalisatrice sublime son héroïne par sa force de caractère, sa force de résilience et sa capacité à aborder la vie d’une manière atypique, propre à ses convictions, qui fait un bien fou. Et c’est un film qui a eu un impact considérable sur moi, je dois l’avouer, pour sa manière d’aborder un lâcher prise face à la société dont on est certainement nombreux·euses à rêver.

L’amour solitaire
L’interprétation de Non est absolument géniale. Actrice méconnue dans nos contrées mais avec déjà quelques films et séries à son actif au Japon, celle-ci incarne son rôle avec un naturel qui rend son personnage charmant, très attachant. , je ne connaissais pas l’actrice mais on la sent incarner ce rôle avec un naturel qui rend son personnage extrêmement charmant. La réalisatrice profite de son actrice pour raconter une histoire contemporaine, où les relations sociales se heurtent à une société qui refuse parfois l’individualité ou la différence, mais aussi les difficultés auxquelles font face les femmes (être seule est mal vu, la pression sociale et familiale…), avec une pointe de sarcasme qui donne beaucoup de hauteur au film. C’est piquant, et c’est aussi visuellement une réussite, avec des scènes très colorées et pleines d’énergie.
En déconstruisant l’image de la femme qu’elle doit être au regard de la société, et à l’aune de ce que le cinéma Japonais en fait habituellement, Akiko Ohku donne beaucoup de force à son héroïne. Solitaire qui s’assume, une femme pour qui l’amour est plus une maladresse et un hasard qu’une volonté, son personnage est réjouissant et plein de fraîcheur. Sa réalisation, dynamique et enjouée, ne manque pas d’appuyer sur une bienveillance omniprésente, avec aussi des questions en toile de fond qui provoquent une émotion intense.