En 2020 sortait The Cursed, une série coréenne horrifique diffusée à l’international par Netflix. Réalisée par Kim Yong-wan et écrite par Yeon Sang-ho (le réalisateur de Dernier train pour Busan), la série a eu une petite notoriété. Permettant au duo de s’atteler à une suite, sous forme d’un film sorti en Corée l’année dernière. Un an plus tard, celui-ci arrive chez nous sous le même nom que la série, disponible ces jours-ci uniquement en VOD, DVD et Blu-ray.
« Suite à une série de meurtres étranges, une journaliste spécialisée dans le paranormal, Im Jin Hee, est appelée en renfort pour mener l’enquête. Alors que la théorie d’un tueur en série semblait la plus plausible, plusieurs corps se mettent à mystérieusement disparaître. Une course contre la montre s’engage pour la journaliste, car les morts se réveillent… » (The Jokers)

Des corps manipulés
Suite directe du drama sorti en 2020, le film part du principe que ses spectateur·ice·s connaissent les lieux. Peu d’introduction de ses personnages et une mise en contexte assez limitée, on est rapidement plongés dans une action où un mort revient à la vie temporairement pour commettre un meurtre. Sous des airs vaguement horrifiques, le film s’intéresse de près au shamanisme, tel un The Strangers. Moins talentueux dans sa mise en scène de rites shamaniques que le film de Na Hong-jin, The Cursed n’en reste pas moins une approche intéressante d’une ambiance et d’un milieu qui n’est pas si fréquent dans l’horreur, y compris en Corée. Qui plus est, le film mélange ces considérations mystiques aux actions d’une entreprise qui semble liée à un mal absolu, sans qu’il ne soit très clair sur ce point au premier abord, en restant plutôt avare en explications. On y apprend pêle-mêle que cette grande société a procédé à des expériences douteuses, provoquant de nombreux décès, tandis qu’une personne manipule les corps morts en les ramenant à la vie pour commettre des meurtres et, semble-t-il, se venger. Une histoire parfois confuse, souvent parce que le film manque de nombreuses occasions de raconter ses personnages et son intrigue pour que l’on puisse rassembler les pièces du puzzle quand on n’a pas vu la série. Mais aussi parce le récit s’embourbe dans une action effrénée qui ne prend pas le temps de raconter ses personnages, de les rendre humains, de leur donner une épaisseur qui renforcerait l’émotion aux moments clés de l’intrigue. C’est certainement moins vrai pour des personnes qui auraient vu la série et qui connaissent déjà ces personnages, mais ce n’est pas mon cas.
Pourtant, à part ça, The Cursed se regarde avec un plaisir certain. La thématique du shamanisme est intéressante et offre une pluralité de sous-thèmes non moins pertinents : les croyances, les peurs ou même encore les rituels qui inspirent eux-mêmes fascination et crainte. Et le film les utilises plutôt bien, en mélangeant le shamanisme dans une action plus classique, comme une course poursuite sur la route qui est particulièrement impressionnante, où le cinéaste propose une mise en scène tout droit sortie d’un film d’action, à laquelle se greffe toutes les particularités d’une « magie » omniprésente. Et même si l’on peine à s’attacher aux personnages, il faut bien reconnaître que le film esquisse quelques bonnes choses, notamment l’héroïne incarnée par Uhm Ji-won, journaliste déterminée à faire la lumière sur ces phénomènes paranormaux, que l’actrice campe avec un talent certain. Même si les rôles secondaires sont moins marquants.

Un héritage télévisuel
C’est sur sa mise en scène, en outre, que The Cursed trouve aussi une certaine efficacité. Sans grandiloquence, le film reste terre à terre avec une réalisation qui tente de placer son récit horrifique (mais peu effrayant) dans le réel. Pour cela, la caméra reste pratiquement toujours à hauteur de ses personnages, sans prendre trop de recul, quitte parfois à manquer de scène marquante. On pourrait lui reprocher d’ailleurs de ressembler énormément à la manière dont sont filmées les séries coréennes, car le film ne renie absolument pas son héritage télévisuel, mais c’est aussi ça qui lui permet de se démarquer d’autres films d’horreur coréens. Le film de Kim Yong-wan assume pleinement sa filiation, quitte à délaisser tout l’aspect photographique en se limitant à une colorimétrie toute grise, un peu paresseuse. Cela montre qu’on est plutôt face à un mode de production télévisuel qui s’intéresse au récit et à son développement plus qu’à l’image cinématographique.
Honnête, The Cursed ne prétend jamais être autre chose qu’un prolongement de la série. On peut aisément lui reprocher d’oublier en cours de route les gens qui voudraient voir le film sans avoir vu la série au préalable, mais il parvient à retomber sur ses pieds grâce à une action soutenue où une forme d’horreur shamanique déferle sur des personnages au destin qui semble déjà scellé. Un bon moment pour une soirée d’horreur à l’approche d’Halloween, mais rien d’indispensable.