500 mètres sous Terre, un rêve abattu

Kim Ji-hoon a eu son petit moment de gloire il y a dix ans avec The Tower, un film catastrophe somme toute sympathique dans lequel un gratte ciel, le soir de noël, s’embrasait. Sans révolutionner un genre déjà bien éprouvé, le cinéaste avait le mérite d’offrir une maîtrise totale sur sa mise en scène, bien accompagné par des acteur·ice·s de qualité (je pense évidemment à Son Ye-jin, quelle actrice !). Alors qu’il s’est fait plutôt discret suite à cela, le revoilà de retour avec 500 mètres sous Terre (ou Sinkhole), encore un film catastrophe mais en l’abordant dans le sens inverse : il ne faut pas ici descendre d’une tour en flammes, mais s’échapper d’un trou de 500 mètres dans lequel est tombé un immeuble résidentiel. Le film est sorti depuis peu en France en DVD, Blu-ray et VOD.

« Dong-won et sa famille viennent enfin de s’installer dans leur nouvelle maison, achetée après des années d’économie. Mais des pluies diluviennes créent un glissement de terrain et le bâtiment est englouti dans un gouffre en pleine pendaison de crémaillère. Isolés à des centaines de mètres sous terre, Dong-won et ses invités ont peu de temps devant eux pour remonter à la surface… » (The Jokers)

© The Jokers Films

Sauve qui peut

Sans intention de bousculer les codes du genre du film catastrophe que s’est approprié le cinéma coréen ces dernières années, Kim Ji-hoon recherche avec son 500 mètres sous Terre ce qu’il a réussi il y a dix ans avec The Tower : la solidité d’un groupe face à l’adversité. Son film, à l’époque, brillait pour la qualité de ses personnages (bien que caricaturaux), sublimé par la direction d’acteur·ice·s dont le cinéaste peut se vanter. Et il réitère ces mêmes qualités avec son nouveau film, qui perd peut-être le charme de la surprise du précédent, mais qui gagne encore un peu plus en qualité d’une dynamique de groupe qui fonctionne plus que jamais. Pourtant on retrouve là encore des archétypes assez classiques, comme le banal père de famille faillible qui révèle sa force dans le drame, le collègue mesquin qui devient un fier camarade, le voisin énigmatique et presque inquiétant qui est d’un courage exemplaire pour sauver son fils avec lequel il a une relation difficile, ou la stagiaire qui tente de se faire une place dans un monde d’hommes. Mais ça marche, et pas qu’un peu, ces personnages formant un groupe terriblement attachant. Chacun de ces personnages subissant les conséquences d’un immeuble construit à la va-vite dans une zone sinistrée, où le rêve de l’achat immobilier, symbole de réussite sociale, tourne au cauchemar. C’est d’ailleurs plutôt intéressant quand le personnage incarné par Lee Kwang-soo (Live), qui apporte souvent une note comique au film au film, parle justement de cette réussite sociale qui lui échappe, jaloux de voir son boss avoir les moyens de se payer un appartement à Séoul alors qu’il ne les aura peut-être jamais. Sans pour autant en devenir une critique sociale, apporter cet ingrédient au film donne corps à un récit qui aurait pu en manquer s’il se limitait à l’action.

C’est d’ailleurs dans la première partie du film, avant le désastre, que le film fonctionne le mieux. Et ce grâce à un humour très présent et plutôt léger, de quoi vite s’attacher à des personnages bien interprétés, avec un vrai plaisir de retrouver Cha Seung-won (Man on High Heels), Kim Hye-jun (Kingdom) et Kim Sung-kyun (D.P.). Trois acteur·ice·s qui apportent un vrai charisme à leurs personnages, devenant plus important·e·s encore que la catastrophe subie, qui devient parfois secondaire, n’étant qu’une excuse au développement de personnages qui pensaient parfois détenir les clés de la réussite mais qui doivent encore faire d’innombrables efforts pour être de meilleures personnes. La mise en scène fait d’ailleurs la part belle à ces petits moments de complicité des survivant·e·s, pour mieux servir par la suite une action qui s’intensifie dans le dernier tiers. Une fin où le désespoir de la situation, de laquelle il ne semble y avoir aucun échappatoire, fonctionne d’autant mieux que l’on espère vraiment tous·tes les voir s’en sortir.

© The Jokers Films

Un ton qui interroge

Le film a néanmoins parfois du mal à se situer, comme en attestent des problèmes de ton. Pas complètement dramatique ni entièrement porté sur la dérision, le film commence sur un ton humoristique jusqu’à la catastrophe. Puis, il retrouve quelques moments un peu drôles par la suite, à des moments moins opportuns, où des situations humoristiques désamorcent maladroitement le danger qui se présente à ses personnages. Il rappelle à certains égards ce que Exit (2019, Lee Sang-geun) a fait à l’époque, sans avoir la même maîtrise sur ce mélange des genres. En outre, son dénouement est un peu facile, pas à la hauteur des bonnes idées lancées tout au long du film. Si l’idée principale n’est pas révolutionnaire (des personnes bloquées sous terre), le fait d’y emmener un immeuble permet de mélanger un faux sentiment de sécurité et l’aspect dramatique d’un événement extraordinaire. Alors j’aurais aimé que le dénouement soit plus complexe, plus inattendu, pour valoriser l’excellent travail fait par le cinéaste sur son groupe de personnages. Quelques petits errements certes, mais cela ne remet pas en cause le bon moment que j’ai passé, dans l’ensemble, face au film.

Je m’attendais à un divertissement sympathique, comme Kim Ji-hoon l’a déjà fait avec The Tower, et c’est exactement ce que j’ai eu. 500 mètres sous Terre a pour lui un casting qui fonctionne extrêmement bien, avec des acteur·ice·s complémentaires et une dynamique de groupe réussie, ce qui est fondamental pour que ce type de film catastrophe fonctionne. Son dénouement n’est certainement pas à la hauteur du reste, mais je ne boude quand même pas mon plaisir de voir passer un représentant tout à fait crédible dans un genre que j’affectionne tout particulièrement.

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